L’IHD (Insan Haklari Dernegi) croit plus en un meurtre politique qu’en un meurtre crapuleux

Ce dimanche 12 mars 2006, l’organisation turque des droits de l’homme (IHD) a communiqué ses premières constatations en ce qui concerne les assassinats de Ferho et Fatim Akgül et ce lors d’une conférence de presse tenue à Diyarbakir. Suite au rapport réalisé par l’IHD -Mardin et Mazlum-Der, une plainte a été déposée en justice. Le parquet a décidé de faire une enquête sur cette plainte, comme la loi l’exige. Les villageois survivants soit une vingtaine de familles ont été interrogés. Conférence de presse: Le vendredi 24 mars à 11h30 à l’Institut Kurde de Bruxelles avec la participation des parlementaires bruxellois Jan Béghin et Céline Delforge qui ont visité le village Mizizah et ont fêté Newroz (le nouvel an kurde) le 21 mars à Diyarbakir.
Le rapport envisage deux thèses: un meurtre politique ou un crime crapuleux. Cette dernière thèse est retenue par les autorités turques alors que l’IHD prend nettement plus au sérieux la thèse du meurtre politique. Bien qu’à ce jour aucune preuve irréfutable n’ait été apportée, les faits concrets prouvent très nettement qu’il s’agit d’un crime politique. L’IHD se pose une question: Pourquoi, s’il s’agit d’un meurtre crapuleux, rien n’a-t-il été volé dans la maison? Pourquoi Fatim et Ferho ont-ils été lardé de coups de couteau avant et après leur mort alors qu’une petite bourse contenant de l’argent a été retrouvée au cou de Fatim? Pourquoi les bagues de Fatim n’ont-elles pas été volées alors qu’on avait brisé les doigts qui les portaient? Pourquoi des voleurs en quête de pillage seraient-ils allés dans une famille connue pour son manque de moyens et ses faits de résistance à l’oppression plutôt que dans une famille aisée donc plus intéressante pour eux? Les seuls biens que laissent les victimes, à part leur maison, sont quelques moutons, chèvres et poules!
Selon l’IHD, le dossier contient trop de faits et de hasards suspects "pour négliger le lien existant avec des implications politiques dans la région." De plus, il est connu que Ferho et Fatim Akgül étaient régulièrement menacés à cause des activités à l’étranger de leurs fils Derwich (directeur de l’Institut Kurde de Bruxelles) et Medeni (écrivain et journaliste à Roj-TV) Ferho. Il faut également savoir que la région de Midyat où se trouve Mizizah est considérée comme étant le repaire de différents clans de ‘gardiens de village’. Ces dernières années, sept meurtres non élucidés ont été perpétrés dans le village de Mizizah et "si les assassins n’ont pas été retrouvés" insiste l’IHD, "cela conforte la thèse d’un crime politique". Tout cela prouve naturellement que la sécurité de tous les villageois est en péril. Aux questions posées par l’IHD, les villageois ont à peine osé répondre et se sont surtout référés au fait qu’auparavant d’autres meurtres impunis avaient été commis. Les dernières familles installées dans ce village auraient l’intention de le quitter chassées par la peur et Mizizah risque de devenir un village fantôme comme il en existe tant au Kurdistan.
Rien ne se passe dans la région sans que cela soit imputable aux ‘gardiens de village’ qui tiennent le pouvoir grâce à un système qui a été installé par l’État turc dans les années quatre-vingt. En échange d’un salaire élevé et d’armes, ces informateurs de l’armée espionnent leurs voisins kurdes qu’ils soient de simples citoyens ou d’hypothétiques membres du PKK. Ils louent leurs services à l’armée et forment une partie essentielle du ‘deep state’ en Turquie.
Prétendre que les coupables pourraient faire partie des gardiens de village – une possibilité que le Ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht, laisse ouverte sans faire le lien avec l’armée et l’État- paraît conforme aux nombreux rapports des organisations de droits de l’homme turcs comme IHD, Amnesty International, Human Right Watch et le Kurdish Human Rights Projets. Mais l’assertion du ministre comme quoi le système des gardiens de village au Kurdistan a été partiellement démantelé est le résultat d’une campagne de désinformation propagée par la Turquie et reprise dans le rapport envoyé au ministre par l’Ambassade de Belgique en Turquie qui nie également l’existence des escadrons de la mort. Or il faut savoir qu’en 2005 deux sous-officiers ont été mis en accusation comme faisant partie d’un escadron de la mort (affaire Semdini) ce qui naturellement est en parfaite contradiction avec les assertions officielles.
Nous craignons donc que ‘des intérêts supérieurs’ liés aux relations économiques et bancaires avec la Turquie ne musèlent définitivement la recherche de la vérité. Le fait qu’après la réception du rapport de l’IHD, le ministre n’ait toujours pas émis le moindre commentaire renforce cette crainte.
 
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